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Journal évolutionnaire 18/08/24 - Ciel de terre

Démarrage de ce nouveau journal évolutionnaire.


Au jardin, dans le flamboiement de la lumière d'Août. Pas de communautarisme dans mon jardin, tout le monde est mêlé à tous. Les tournesols géants commencent à ouvrir prudemment leurs fleurs au soleil. Je constate que des escadrons d'altises, ces puces de terre presque invisibles attaquent les nouveaux choux d'hiver. Tandis que je sarcle, courbé, je songe aux révélations du robot Persévérance sur la présence de signatures chimiques qui auraient pu être formées par la vie sur Mars, il y a environ 4 milliards d'années.


J'aime à penser que toute l'histoire du monde a commencé dans un jardin. Je me souviens de nos travaux matinaux dans la plantation de mon ami Aimé, un retraité de l'ethnie Gouro en Côte d'Ivoire. Machette à la main, harcelés par les mouches tsé-tsé, nous nous rendions dans sa parcelle pour entretenir les cultures de manioc et d'ignames, de niébé et de maïs. J'aimais l'humus de la forêt tropicale, son immense pilosité arbustive à l'ombre de laquelle nous cheminions accompagnés de cris d'oiseaux.


Nous parcourions un réseau complexe de traboules végétales, chacune débouchant sur la plantation d'un villageois. Il y avait cependant de petits croisements animés ou les cultivateurs se retrouvaient autour de palmiers coupés dont nous buvions le vin de palme, frais, extrait sur place. Je pense à tous ces paysans villageois ivoiriens, togolais, ghanéens, burkinabés et sénégalais dont j'ai partagé le quotidien âpre, robuste et généreux.

J'apprends que le Burkina Faso annonce la création d'une Agence Atomique. On sent la volonté de ces petits pays du Sahel de ne plus courber le dos face au destin, d'oser l'avenir, alors même qu'ils sont frappés de plein fouet par le terrorisme et freiné par la faiblesse des ressources et la pauvreté  des infrastructures.


Leur développement est considérablement entravé par l'instabilité politique et militaire que mettent à profit de nouveaux prédateurs internationaux étatiques ou privés. Le terrain des ambitions annoncées par les nouveaux dirigeants du Burkina, du Mali et du Niger est miné par leur propre naïveté. J'ai parcouru des années durant ces pays attachants d'humanité, en y portant des projets, en y vivant des amours et des amitiés fortes, en œuvrant au rêve d'un futur commun, mais comme beaucoup, je constate qu'ils restent encore traumatisés par une transition postcoloniale non assumée.


Leurs élites n'ont pas engagé cette transition en s'appuyant sur les diasporas, en créant des ponts avec elles, comme le fait le Ghana où comme le tentent timidement le Maroc et le Sénégal. Les diasporas sont les clés de l'accélération du développement des pays africains, mais faut-il encore que les pays maintiennent un cadre démocratique, économique et culturel favorable à ces liens.


Les incendies d'été flambent en Méditerranée et en Californie. L'ouverture par l'Ukraine d'un front de guerre sur le territoire de la Russie, l'attente maintenue d'une réaction de l'Iran et de ses proxys sur Israël et l'extension de la variole du singe en Europe et dans le monde maintiennent la montée de la pression globale.


Tous ces éléments me traversent et me harponnent tandis je plante des betteraves, sèment les derniers haricots, désherbent certaines planches. Toutes ces opérations jardinières m'imposent d'être courbé vers le sol, la terre, cette Gaia matricielle qui épousa son fils Ouranos et mit au monde les titans, les cyclopes et les géants à cinquante têtes, les Hécatonchires.


Je me sens simultanément dans un coin du Tarn, dans la rumeur bruyante et inquiète de la planète et dans un point inouïe de l'univers. Un jardin est un bout d'infini rapporté à la mesure d'un regard humain.   

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